Rétro 2019 : Ils ont fait l’actualité locale au Cameroun 9-16

Rétro 2019 : Ils ont fait l’actualité locale au Cameroun 9-16

Ils sont hommes politiques, jounalistes, jeunes manipulés par l’élite ou victimes des tares de l’urbanisation. Ils ont été à la une en 2019. Voici la liste de la 9e à la 16e place. 

 

9. Les “Ambazoniens”

Revendiquant leur appartenance à une république imaginaire, l’Ambazonie, correspondant au territoire des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ancien Southern Cameroon, les sécessionnistes appelés Ambazoniens ont imposé leur présence dans l’agenda politique du Cameroun en 2019. Non seulement, ils ont pesé dans l’incertitude qui a entouré la programmation des élections législatives et municipales, mais en plus, ils ont poussé le pouvoir de Yaoundé à organiser le Grand dialogue national et décider du statut spécial des régions du Nord Ouest et du Sud Ouest.

 

10. Les jeunes casseurs de Sangmelima

Les dates du 9 at 10 octobre 2019 sont déjà inscrites parmi celles qui seront rattachées au passif de la gouvernance du pays sous le Renouveau. En effet, ces jours-là, les jeunes désoeuvrés de Sangmélima dans le département du Dja et Lobo dans la région du Sud, dont est originaire Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, ont pillé et saccagé les commerces des ressortissants des communautés bamoun et bamiléké installées dans cette localité, sous le regard complaisant des forces de l’ordre. Le tollé suscité grâce aux réseaux sociaux a enfin poussé les autorités à réagir après 48 heures d’émeutes. Quelques jours plus tard, le Chef de l’Etat, brisant enfin le silence dans un communiqué, ordonnera l’indemnisation des victimes.

Ces événements surviennent dans un contexte marqué ces dernières années par une montée en puissance des discours haineux et tribalistes, y compris au sein de l’appareil gouvernemental – avec des antécédents jamais réprimés du reste -, et une inflation de l’ethnisation du débat politique. Des atteintes au fragile vivre ensemble qui n’ont enfin été timidement prises au sérieux que lors de la session législative extraordinaire de décembre. Les députés ont en effet voté la loi n°2019/020 du 24 décembre 2019 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°2016/007 du 12 juillet 2016 portant code pénal, dont l’article 241 nouveau pénalise désormais l'”outrage à la tribu”.

 

11. Les sinistrés de Gouaché

Plusieurs experts s’échignent à interpeller les pouvoirs publics sur les conditions d’accès à la propriété foncière, qui poussent certains Camerounais à prendre de plus en plus de risques pour se loger, soit sur les flancs de montagne, soit dans des zones de marécages appelées “élobi”. C’est justement le cas des familles sinistrées du bloc 6 du quartier Gouaché 4 dans le 3e arrondissement de Bafoussam. Elles ont été victimes d’un glissement de terrain mortel dans la nuit du 28 au 29 octobre 2019. Au final, 43 morts dont des familles de 8 et 17 personnes.

Une catastrophe qui est venue remettre au goût du jour plusieurs problèmes dont celui de l’accès à un logement décent ou à la terre dans les zones urbaines pour petites bourses, celui du respect des normes de construction notamment sur les versants de collines, celui de l’organisation et du fonctionnement de la direction de la protection civile du ministère de l’Administration territoriale ou encore la réactivité des autorités administratives, des forces de l’ordre et sapeurs pompiers. Les images vues sur la toile ont davantage mis en évidence le volontariat des riverains sous l’oeil admiratif des éléments des forces de l’ordre. L’un d’eux, héros de l’événement, du nom de Dilane Goumka Gumte, s’étant particulièrement illustré.

150 familles recensées ont été recasées dans les réserves foncières de la commune, notamment à Lache et Lemgoue. Mais des inquiétudes persistent quand on sait que les familles recasées à l’entrée de la chefferie Bamoungoum l’ont été dans une zone marécageuse.

 

12. Henri-Séverin Assembé

Expert en développement territorial, ce journaliste aux compétences diverses est le promoteur de l’Institut des Hautes études sur la gouvernance territoriale et la décentralisation (He-Gtd), a multiplié les initiatives en 2019. En février, on l’a vu à Ebolowa former les jeunes de la régions du Sud sur le thème “construire l’attractivité territoriale et l’entrepreneuriat”. Une initiative qui rejoint d’autres actions menées par cet entrepreneuret enseignant de l’Institut des relations internationales du Cameroun (Iric) pour promouvoir plusieurs pans de la décentralisation que le politique ne met pas suffissamment en exergue. Le chef de la division  Prospective, coopération et communication au Programme supérieur de spécialisation en finances publiques a aussi signé le 31 décembre 2019 une convention avec l’association des acteurs du tourisme pour promouvoir le tourisme dans les territoires. Il a en outre organisé les 13 et 14 décembre 2019 à Mfou le 1er Salon itinérant de l’entrepreneuriat territorialisé et de l’auto-emploi.

Avant cela, en novembre, il a organisé un atelier pour promouvoir auprès des collectivités territoriales le volontariat dans stratégies de développement local. Et tout au long de l’année, il a organisé plusieurs sessions des “Dîners de la décentralisation”, qui donnent la possibilité à un expert trié sur le volet d’entretenir les acteurs de la décentralisation sur les nombreuses opportunités qu’offre cette réforme sociale et de l’Etat.

 

13. Paul Atanga Nji

Plusieurs fois en lumière en 2019, le ministre de l’Administration territoriale semble même s’être assagi sur la deuxième moitié de l’année. S’est il fait taper sur les doigts? Toujours est-il que celui qui est en même Secrétaire permanent du Conseil natonal de sécurité s’exprime moins devant les caméras. Il faut dire que chacune des sorties médiatiques de celui dont le passé trouble jure avec les fonctions sensibles qu’il occupe, est source de polémique.

En 2019, quelques-unes de ses saillies ont mis de l’huile sur le feu de la crise post-électorale, lui qui était allé jusqu’à menacer le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) d’interdiction si ce parti maintenait ses marches blanches de protestation contre les résultats de la présidentielle d’octobre 2018. Le 6 décembre, il destituait un chef traditionnel de ses fonctions, aux motifs “d’instigation et incitation à l’insurrection, insubordination caractérisée à l’endroit des autorités administratives et participation active à une manifestation publique interdite”. Sauf que la coïncidence est troublante: le concerné n’est autre que Paul Marie Biloa Effa, Conseiller spécial de Maurice Kamto, président du Mrc et qui, a comme son leader, été incarcéré dans le cadre de la crise post-électorale. Bénéficiant du soutien certains chefs traditionnels ewondo, la cinglante réaction du chef Mvog-Betsi du clan Mvog-Tsoung Mballa au quartier Messa Nkoba’a dans le 2e arrondissement de Yaoundé a été proche d’une humiliation d’un membre du gouvernement.

Pour boucler l’année, Paul Atanga Nji a minimisé les graves conséquences humanitaires de la crise anglophone et accusé les organisations humanitaires internationales d’exagérer les chiffres et d’utiliser leur couvert pour faire passer des armes aux Ambazoniens. Ce qui a poussé le Bureau de l’Onu au Cameroun à faire une sortie musclée de mise au point, rappelant du reste que 4,3 millions de personnes sont en situation d’urgence avec seulement 41% de leurs besoins couverts.

Soupçonné d’être derrière certains journaux dont les unes et la charte graphique dénotent la dictée préparée d’une parution à l’autre, le Minat semble néanmoins intouchable et sera un acteur décisif en 2020, année électorale.

 

14. Célestine Ketcha Courtès

Nommée ministre de l’Habitat et du développement urbain le 04 janvier 2019 en remplacement d’un originaire du même département qu’elle – lui-même succédant à un autre fils du Ndé -, l’ex-maire de Bangangté (2007-2019) a tout de suite voulu donner le ton en multipliant les initiatives avant de comprendre dans quel univers elle venait d’entrer. Son caractère passionné, son dynamisme et son goût de la prise de risques devaient apprendre à vivre dans le milieu de “l’inertie, l’incompétence, voire la malveillance” (cf. Paul Biya dans son adresse à la Nation le 31 décembre 2012, mais déjà évoqué le 31 décembre 2003).

Deux semaines seulement après avoir pris fonction, l’ancienne présidente du présidente du Réseau des femmes élues locales d’Afrique (REFELA) va mobiliser les engins de la mairie qu’elle dirige encore pour curer les fosses d’aisance du 6e arrondissement de Yaoundé devenu célèvre avec ses odeurs de puantes fosses dégoûlinantes sur la chaussée qu’emprunte notamment le ministre de la Communication qui vit dans le coin. Ce zèle va lui valoir une volée de bois vert du maire Yoki Onana qui fulmine de n’avoir pas été associé ni informé par la ministre. Dans la même période, on la voit dans plusieurs quartiers de Yaoundé à prendre la mesure des nombreux problèmes de la ville capitale. La volonté semble réelle, mais les résultats sont peu flatteurs.

En février, elle a donné deux mois aux entreprises qui n’avaient pas livré leurs chantiers depuis 2013 pour le faire, sous peine de voir leurs contrats résiliés comme ils auraient dû l’être depuis longtemps.

En avril, elle ordonne, sans succès, la fin de la vente à la sauvette à la poste centrale de de Yaoundé, pour lutter contre les embouteillages que cette activité cause.

En mai, elle obtient l’élection du Cameroun au Conseil exécutif de Onu-Habitat et sa désignation comme pays hôte de la célébration de la Journée mondiale de l’habitat le 07 octobre.

En septembre, elle lance la campagne “Yaoundé, capitale propre” pour préparer  le Championnat d’Afrique des nations (Chan) en 2020 et la Coupe d’Afrique des nations (Can) en 2021. L’objectif de ce concours, qui primera 3 lauréats avec une enveloppe de 5 millions de francs, est de sensibiliser et de mobiliser l’ensemble des acteurs pour les opérations d’entretien des espaces urbains et du cadre de vie, et promouvoir des initiatives locales en matière d’hygiène et de salubrité.

 

15. Malachie Manaouda

Il aurait sans doute été intéressant de questionner l’autochtonie du ministre de la Santé publique nommé le 4 janvier 2019, s’il avait été candidat dans une mairie de ville, lui que certains présentent comme Camerounais d’origine tchadienne.

Le benjamin du gouvernement, 46 ans, qui montre sa différence depuis le premier jour en étant très présent sur les réseaux sociaux, a marqué l’année 2019 par son style particulier. L’ancien secrétaire général du ministère des Arts et de la culture, du ministère de l’Eau et de l’énergie ou encore du ministère du Commerce a multiplié des descentes inopinées de jour comme de nuit dans des hôpitaux et centres de santé pour toucher du doigt la qualité de service rendu aux patients. Et il a dû sévir plusieurs fois contre des personnels de santé.

Cet administrateur civil principal, titulaire d’un PhD en relations internationales, a marqué des points et les esprits par une réactivité inhabituelle dans les gouvernements successifs du Renouveau, comme cela a pu se voir dans l’interdiction des séquestrations des malades démunis dans les hôpitaux pour défaut de paiement, mais aussi ce qu’on a appelé le scandale de l’hôpital de district de Déido à Douala ou celui de l’hôpital de district de Kaele dans la région de l’Extrême Nord. Dans le premier cas, le personnel de l’hôpital s’était distingué par une frénésie à des faire des prises de vues plutôt que de secourir un élève qui venait de se faire poignarder et qui ne survivra pas à ses blessures. Dans le deuxième cas, aucun médecin compétent n’avait été présent pour prendre en charge la jeune Widiba qui nécessitait une césarienne et décèdera en couches faute de soins appropriés.

En juillet, il s’est attaqué aux formations sanitaires clandestines et pour boucler l’année, à la faveur du départ de la 19e mission médicale, il a félicité la coopération médicale chinoise qui opère au Cameroun depuis 1975 au bonheur des populations notamment des villes de Yaoundé, Mbalmayo et Guider.

 

16. Jean de Dieu Momo

Jamais à court de pitreries, le ministre délégué auprès du ministre de la Justice semble en mission contre l’un de ses prédécesseurs au poste, Maurice Kamto, passé depuis 2011 dans l’opposition. Ses posts sur les réseaux sociaux sont de véritables biscuits de sottises et de langage ordurier qui font jurisprudence, pour emprunter au domaine de celui qui sortit de l’anonymat comme avocat des  “9 disparus de Bepanda” en 2001 alors que chauffait le “commandement opérationnel” du général Mpay. Il s’agit d’une unité spéciale de l’armée créée par décret présidentiel pour lutter contre le grand banditisme, et qui multiplia les exactions. Il a été avocat au Tribunal pénal international des Nations Unies pour le Rwanda dès 2006.

Jamais un ministre de la République n’avait autant inspiré la blogosphère par ses saillies, les unes plus questionnables que les autres sur les vraies raisons de la nomination du natif de Bafou qui compara le sort des Juifs sous les Nazis à celui des Bamileke sous le régime en place, sans jamais être forcé à renier ses propos, à défaut de démissionner. Voici en substance, ce qu’il déclara dans l’émission Actualités Hebdo du 03 février 2019 sur la chaîne de télévision d’Etat: «En Allemagne, il y avait un peuple qui était très riche et qui avait tous les leviers économiques, les Juifs. Et ils étaient d’une arrogance (…) telle que les Allemands se sentaient un peu frustrés. Puis un jour est venu au pouvoir un certain Hitler, qui a mis ces populations-là dans des chambres à gaz. Il faut que les gens instruits comme M. Kamto puissent savoir où ils amènent leur peuple.» Discours désobligeant qui a valu une sortie du ministre des Relations extérieures pour calmer l’ire d’Israël. Mais que dire des Bamileke ciblés par ce propos et qui ont déjà été victimes d’un génocide lors de la guerre d’indépendance?

Incapable de gérer la contradiction sur les plateaux, le Président du parti les Patriotes démocrates pour le développement du Cameroun (Paddec) créé en mars 2010, a été candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2011, avant de rallier le G20, un groupe de partis d’envergure modeste réunis en octobre 2018 autour de la candidature de Paul Biya. Qui peut encore se souvenir que ce conseiller municipal dans le 5e arrondissement de Douala a composé et interprété un morceau médiocre en 2011 sur les tares du régime en place? Lui-même doit avoir déjà oublié qu’il a été en 2011, aux côtés de Patrice Nganang, le cyberjournaliste Gérard Philippe Kuissu et l’écrivain Bertrand Teyou, à la création du Tribunal Article 53, une organisation de la société civile dont le but est de recenser tous les actes de Paul Biya relevant de crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale.

 

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Auteur

Kamdem Souop
Kamdem Souop 343 Articles

Écrivain, éditeur et spécialiste de communication sur le changement de comportement social, il a dirigé le journal en ligne www.villesetcommunes.info et la WebTv www.villesetcommunes.tv de 2011 à 2020.

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