Mémoires: Le Cameroun a perdu 22 artistes en 24 ans

Mémoires: Le Cameroun a perdu 22 artistes en 24 ans

De Kotto Bass à Hoiguen Ekwalla, ils sont nombreux ces voix d’antan qui ont fait dansé ou rire des milliers de générations. Ceux là, ce sont les artificiers de la mélodie, du chant, de la comédie ayant inspiré les nouveaux talents d’aujourd’hui. Le Cameroun a perdu de précieux orfèvres de notre culture de 1996 à 2020. Via un Dossier spécial, Villes & Communes est revenu sur ces acteurs qui ont écrit en lettres d’or et par delà les frontières, un conte exceptionnel de notre Patrimoine Culturel.

1-Kotto Bass 

C’est le 20 novembre 1996 que Nyamsi Kotto Théodore Auger alias Kotto Bass, le talentueux bassiste et chanteur camerounais de renommée internationale s’en est allé.

Il avait à peine 33 ans, lorsqu’il a quitté ce monde. Auger Théodore Nyamsi dit Kotto Bass est mort à Douala à la suite d’une courte maladie. Brillant malgré son handicap, un pied paralysé par une poliomyélite sévère dans l’enfance, Kotto Bass savait allier paroles et sonorités chatoyantes. Ce qui avait le bon de donner une coloration sans pareille à ses chansons.

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2-Jean Michel Kankan

Le célèbre humoriste de son vrai nom Dieudonné Afana Afana Ebogo, dont les œuvres continuent d’égayer, s’est éteint à Yaoundé le 13 février 1997. Né à Nkom, petit village du département du Nyong et Mfou-mou, en 1956 de Jean Ebogo et Madeleine Nga, il passe son enfance à Ber-toua à l’Est du pays. Et son adolescence à Yaoundé. Devenu adulte, il est tout d’abord professeur de langue française dans un collège secondaire privé.

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Des années plus loin, il abandonne cet emploi pour travailler comme agent publicitaire. Pendant ce temps, il flirte avec Radio Cameroun où il anime une émission humoristique. Ses débuts sont cependant laborieux et le public n’est pas au rendez-vous. Peu à peu, il devient connu en faisant des places au prix de lOFcfa. Sa notoriété devient internationale, particulièrement en passant à la télévision, dont les diffusions ont largement dépassé les frontières du Cameroun.

Au cours des années 70, 80 et 90, bien inspiré, il aligne de nombreux sketches: «la fille du bar», «l’élève international», «maladie d’amour», «la carte nationale d’identité», «le cadavre de Mand-jounga», etc. S’il fait un tabac au Cameroun, c’est en Afrique de l’Ouest que l’homme est le plus sollicité. Au Togo notamment où le président Eyadema en fait un ami.

Pour faire passer son message, Jean Miché Kankan use alors du langage de l’homme de la rue. Il en multiplie des clichés à l’époux et chef de famille qu’il représente: en état d’ivresse, ignorant, insouciant et parfois irresponsable. Dans ses textes, il interpelle la société sur des problèmes auxquels elle est confrontée. Comme elle est encore aujourd’hui.

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3-Eboa Lotin (décédé le 06 octobre 1997 à Douala)

Musicien camerounais Emmanuel Eboa Lotin faisait la fierté de l’Afrique noire à travers sa musique. Lors de scène, il dansait avec de l’humour et  oubliait parfois qu’il  était infirme. Dans les années 1970, Eboa Lotin avait épaté les zaïrois par sa chanson  Matumba Matumba», «Bésombe ». Produit par maison Philips, il va jouer au Ciné Palladium (Ex-Albertum, en face de la grande poste de Kinshasa) dans la commune de la Gombe et au parc de Boeck de Kinshasa (actuellement Jardin Zoologique de Kinshasa).

Eboa Lotin est reconnu comme le patriarche « Eyum’a moto » dans son Cameroun natal. Parmi les chansons connues de Eboa Lotin à Kinshasa, on peut citer «Matumba Matumba», «Bésombe » et la chanson « Amanu » qu’il avait dédié aux musiciens congolais Tabu Ley, M’pongo Love et le camerounais Francis Bebey.

4-Tchana Pierre, décédé le 18 Novembre 1998 à Douala

Né le 2 février 1945 à Bangoulap dans le département du Ndé région de l’Ouest ,il passe son enfance à Nkongsamba .Jeune élève ,Tchana chante à l’église comme la plupart des enfants de son âge .En 1957 ,il remporte avec sa flûte le premier prix d’une émission publique organisée par Radio Douala .

En 1959 ,il se rend à Yaoundé où il poursuit désormais ses études tout en faisant la musique .En 1961 ,Radio Yaoundé enregistre ses chansons dans le cadre d’un cadre d’un programme destiné à la découverte des jeunes talents .A partir de 1963 ,il chante à l’ancien pezzena Bar au quartier Madagascar ; te en 1965 ,il crée son propre orchestre ,le Travel Jazz .La même année ,il signe son premier contrat discographique avec les éditions <> .puis en 1968 ,il enregistre le disque << IL N’est jamais trop tard >> chez Philips .En 1970 ,il signe un contrat avec les éditions SATEL dont il devient le représentant en Afrique centrale.

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5-Tom Yom’s, décès le 25 décembre 2007 à Douala

Thomas André Eyoum Eyoum est le vrai nom de Tom Yom’s. Né le 11 mars 1957 à Dibombari au Cameroun, il meurt le 25 décembre 2007 à Paris de suite d’une longue maladie. Dans un de ses articles publiés en 2007, ma consœur Susan Kalla Lobè lui rendant hommage, parlait de lui comme celui qui « chante en anglais sans faire des onomatopées en articulant chaque mot. Il a le groove de Fela avec le beat de Wilson Picket ». D’où son autre pseudonyme « Américain de Dibombari ».

Parler de Tom Yom’s c’est parler de « Pona pona », sa chanson mythique qui ne cesse de bercer le Cameroun et les Africains grâce à nos médias. Comme héritage, il nous  également laissé « Djamaa Nylon », « Vanité », « Johny Waka » ou la chanson « Trésor » qui reste un classique dédié à l’Amour des plus repris dans la musique camerounaise. Il y a son magistral instrumental « Esubaka » qui  ce jour est la musique de plus d’un film et de plusieurs interludes. On a des collaborations qui parlent d’elles-mêmes : « Na meya » avec la jazzwoman Bebe Manga, « Senga To » avec la star Charlotte Mbango, la belle reprise « Thérèse » avec son auteur Tchana Pierre. Sans oublier celles avec des artistes très connus tels que l’ex-Zangalawa Annie Anzouer, la chanteuse à succès Beko Sadey, le disque d’or Ben Decca, avec la Diva Grace Decca, avec celui qui a été son mentor Eboa Lotin et bien d’autres.Il est aussi à l’origine de la première radio privée qu’il a créée à Douala la RTM, et plus tard la télévision avec LTM qui avaient pour crédo la promotion de la Culture camerounaise.

6-Hoïguen Ekwalla (décès 24 octobre 2008 à Douala)

Son dernier album devait sortir en février 2009. Le 31 décembre 1990, sur le plateau de télévision de la chaîne nationale camerounaise, des artistes défilent. Jusqu’à l’arrivée d’un homme. Pantalon lin blanc, dont les plis bougent au rythme du Makossa, une paire de lunette noire, même couleur que la chemise, l’homme répète de sa voix suave “ femmes il faut supporter, c’est le mariage ” des applaudissements crépitent.

A 49 ans, il s’est éteint a l’hôpital Laquintinie de Douala, “ après quelques jours seulement de maladie ” murmure Nyango,la nièce qui partageait avec lui la maison familiale, à Deido, depuis 2001. “ Mon oncle était très introverti, timide à la limite ”, témoigne-t-elle. Mêmes mots chez Ndemba Tanga, l’homme qui a produit le 2ième album de l’artiste. “ Il est venu me trouver à Paris vers 1980, il était très travailleur et je l’ai appuyé ”, raconte l’homme amaigri, les yeux fixant un point invisible à l’horizon.

Hoigen Ekwalla, de son vrai nom Ekwalla Mpouli Eugène, est orphelin de père dès l’age de 5 ans. Encadré par sa mère et sa sœur aînée, le jeune homme dès l’adolescence est porté vers la mécanique. Il l’apprendra au collège de la salle à Douala. “ Dans un de ses clips, il dépanne une voiture, il ne fait pas semblant. C’était son premier métier ”, expliquait un membre de la famille explorée.

Mordu de musique, Hoigen se lie d’amitié avec Djene Djento. Ensemble, ils écument les cabarets de la ville. “ Le grand frère Kotti François lui permet de chanter pour la première fois dans un groupe. Très doué à la guitare, il s’envole pour paris a la fin de 1980 pour son 1er album ”, raconte Djene. Jean Louis Mpouli Ekwalla, le fils de Hoigen, réécoute sans cesse les chansons de son père depuis son décès. “ C’est de moi qu’il parle dans la chanson Mimi, ça force c’était sa guitare, mon père jouait toutes ses guitares dans ses chansons. Il allait en studio avec elle. Il me l’a ramenée lors d’un de ses séjours. Je la partageais avec lui. Je suis obligé de prendre le relais ” Pas de pleurs, juste une douceur à l’évocation des souvenirs.

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Manfred Essome
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