Autoroute Yaoundé-Douala : Le Cameroun affole les statistiques !

Autoroute Yaoundé-Douala : Le Cameroun affole les statistiques !

Le top départ de construction routière devient chaque année, plus intriguant au fil du temps. La définition du budget alloué par les administrations compétentes, et l’addition des entreprises adjudicataires, posent la problématique du cout des infrastructures routières au pays.

Il s’agit d’un des axes routiers les plus fréquentés au Cameroun. Il relie en effet les deux grandes villes et est soumis à un trafic à la fois élevé, mais également un grand pourvoyeur de recettes au profit de l’Etat. Ayant estimé que la route mérite un réaménagement, l’autoroute a été l’option première en Octobre 2014.

 

En phase 1

Le Ministère des Travaux Publics, en données ouvertes renseigne de ce que l’exécution doit se faire en deux phases. La phase 1 Yaoundé-Bibodi pour un linéaire de 60kms pour un montant de 284 milliards de FCFA (Hors Taxes), et l’entreprise adjudicataire est China First Highway Engineering. . La construction des premiers 60 kms repose sur un profil en travers type de 33,5m de plateforme avec 2×2 voies de 7,5 mètres de largeur, extensibles au niveau du Terre Plein Central (réservation de 10,5 mètres) en 2×3 voies de 11,25 mètres de largeur pour une vitesse de référence de 110 km/h. Il est à noter qu’EXIM BANK CHINA le finance à 85% et l’Etat du Cameroun à hauteur de 15% (avec TVA, Droit Douane, Impôts, +Taxes).

La mise en exploitation de cette section 1 autoroutière nécessite selon le libellé du projet MINTP : les aménagements et équipements de services et de péages,  les travaux raccordement au réseau urbain de la ville de Yaoundé par Minkoameyos-Nkolbisson-accès Centre administratif et le raccordement à la Nationale 3 par Boumnyebel, pour un montant d’environ 108 milliards de FCFA.

D’ailleurs, l’option envisagée pour l’exécution de ces prestations supplémentaires et la mise en exploitation de toute la phase 1, répond au cadre juridique des contrats de partenariat Public-Privé. Alors que les délais d’exécution général étaient de 48 mois, il y’a eu un coup d’arrêt entre 2016 et 2018 pour des motifs divers dudit chantier, à l’image la non-libération de certains linéaires par les populations, l’injection lente de la trésorerie, et des contraintes connexes. Assurer la liaison autoroutière entre les capitales politique et économique, ce projet doit participer à la modernisation des infrastructures de transport et de l’amélioration des conditions de circulation et de sécurité sur les itinéraires actuels. Toutefois, le montant de 284 milliards de FCFA en phase 1, vient en baisse de 61 milliards contrairement à ce qui avait été communiqué par la Direction des Investissements routiers du MINTP en février 2018, soit exactement 345, 781 milliards de FCFA.

Que dit la phase 2

Pour l’acte 2 de la pose d’autoroute Yaoundé-Douala, il démarre effectivement à partir de la localité de Bibodi en deux sous-sections précises. D’abord que nous nommerons sous-section A de 122 kms, réparti comme suit,  Bibodi – Log Badjeck (101 Kms), avec deux bretelles autoroutières pour desservir la ville d’Edéa à l’Ouest (11 kms) par la voie de contournement et à  l’Est (10,2 kms) par la Route nationale numéro 3.

Enfin la sous-section B de 46,6 kms : Log Badjeck- Voie de contournement de Douala (39 kms) avec une bretelle autoroutière permettant la desserte de la nouvelle ville de Dibamba Beach et Douala Sud (7,6 kms).

A cette phase 2, 822 milliards de FCFA sont nécessaires nous renseigne le Ministère des travaux publics, pour un ratio d’environ 4,19 milliards de FCFA le Km bitumé (en 196 kms). Pour un projet majeur qu’est l’autoroute Yaoundé-Douala, on est passé à plus de 4,32 milliards de FCFA le prix du Km bitumé, soit 5 fois plus cher que la plupart des infrastructures africaines de meme économie, selon le rapport 2018 de la Banque Mondiale au Cameroun.

Coup d’œil sur quelques projets routiers au Cameroun

L’Itinéraire : Kribi – Lolabé Linéaire : 38,5 Km d’autoroute ; avec un Coût d’intervention : 453 millions de dollars US, soit environ 250 milliards de FCFA (HT), soit 6 493 506 493 milliards de FCFA le km bitumé pour 42 mois de travaux.

Autoroute Kribi-Edéa pour 92Kms (phase 2) avec 485 milliards de FCFA soit 5,27 milliards par km conception, la construction, l’exploitation et la maintenance de l’ouvrage 36 mois

 

Plus près en Afrique

Cote-D’Ivoire  Les autorités ivoiriennes ont lancé en 2016 les travaux de prolongement de l’autoroute du nord, section Yamoussoukro-Tiébissou. Portant sur une longueur de 37 kms, le projet a bénéficié d’un cofinancement de la Banque islamique de développement à hauteur de 77,403 milliards de franc CFA. Les travaux devraient être achevés dans deux ans. La Côte d’Ivoire a dû recourir à la Banque islamique de développement (BID) pour ces travaux de prolongement. D’un coût global de 92,637 milliards de Fcfa, le gouvernement même n’a pu mobiliser que 15,234 milliards de Fcfa. Il est donc revenu à la BID de débloquer une enveloppe de 77,403 milliards Fcfa pour cofinancer le projet.

Gabon La durée des travaux est fixée à 21 mois pour un coût d’environ 54,9 milliards FCFA, financés à hauteur de 45 milliards FCFA par une convention de prêt avec la BDEAC, les 9,9 milliards FCFA restant correspondant à la contrepartie apportée par l’Etat Gabonais. Le soutien financier de la BDEAC permet de sécuriser le financement du projet et ainsi d’assurer le respect des délais d’achèvement du projet.

Ethiopie Les autorités éthiopiennes ont inauguré le 19 juin 2019, une autoroute à péage entre Dire Dawa et Dewele. Construite par le chinois CGC Overseas Construction Group, cette infrastructure de 220 kms de long reliant l’Ethiopie à Djibouti a nécessité un investissement estimé à 180 millions de dollars et financé majoritairement par la Chine, soit 450 millions le km bitumé. L’Ethiopie compte désormais une deuxième autoroute à péage après celle de la voie rapide Addis-Abeba-Adama.

 

Les indicateurs potentiels de la hausse du cout absents sur dessins-projets

Sur la plupart des lignes budgétaires, les données de financement devraient mentionner des couts potentiels de déplacement des conduites de transport en matière de services essentiels notamment d’eau, électricité, des réseaux télécoms et bien d’autres. Ensuite une partie financement dédiée aux aménagements et paysagers, l’éclairage public et de la signalisation lumineuse. Conformément à la règlementation en matière environnementale, des mesures environnementales et sociales sont également prévues sur la plupart des chantiers africains. Ces mesures incluent notamment des campagnes de sensibilisation trimestrielles, des équipements pour la préservation de l’environnement pendant les travaux et la construction d’aménagements connexes (bâtiments et un parking).

Outre les effets d’échelle, qui font que le coût du km diminue lorsque la longueur de la route augmente, il est important de prendre en compte le relief, l’hydrographie des zones, qui sont pour la plupart présents dans les études d’impact.

En outre, la main d’œuvre mobilisée est un autre facteur important expliquant le coût d’un projet. De ce point de vue, la Banque Africaine de Développement indiquait, dans son rapport Stratégie Pays en 2010 pour le Gabon par exemple, que le coût de la main d’œuvre au Gabon était comparativement plus élevé que dans la plupart des pays de la CEMAC. Rappelons qu’au Gabon, le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti) est officiellement passé de 80 000 FCFA en 2006 à 150 000 FCFA en 2010, soit une hausse de 87,5%, au bénéfice des travailleurs.

Enfin, une grande majorité des équipements routiers (éclairage, glissières, panneaux de signalisation, lampadaires, conduites, équipements électriques, etc.) ainsi que le bitume sont pour la plupart importés, malgré l’existence d’alternatives nationales au Cameroun. Le coût de ces intrants contribue aussi à augmenter la facture des travaux routiers.

Emmanuel Nganou Djoumessi, le mea culpa

Interrogé lors du Conseil de cabinet du 23 mai 2019 au sujet des surfacturations des projets routiers en cours, le ministre des travaux publics s’explique : « le renchérissement des couts des travaux routiers est principalement dû aux insuffisances observées dans la réalisation des études techniques et géotechniques. À cela s’ajoute les contraintes inhérentes à la fiscalité, aux indemnisations et déplacements des réseaux, les incertitudes dans les délais de paiement des entreprises, le recours ou non à la concurrence dans l’attribution des marchés ainsi que l’évolution des prix des principaux intrants tels que  le ciment, le fer, le bitume et les  granulats».

Dans la suite de sa plaidoirie, il ajoute que le gouvernement cogite urgemment sur une stratégie qui permettrait d’éviter de manière systématique ces nombreux dysfonctionnements dans les prochains chantiers routiers. Nganou Djoumessi souligne  que ladite stratégie va intégrer «l’adoption d’une nouvelle approche de fixation des prix unitaires fondée sur des prix moyens pratiqués, la réalisation de la commande publique sur la base des études techniques rigoureuses et conformes aux critères de maturation des projets d’investissements, le redimensionnement des routes pour diminuer le cout des terrassements et des chaussées, la promotion des contrats public-privé dans la construction, la mise en œuvre d’une industrie routière inclusive fondée sur la promotion de quelques champions nationaux.»

 

 

 

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Manfred Essome
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